[22 mars 2025] «Innovations en zoosémiotique», Astrid Guillaume, ASL, Sorbonne Université, Amphi Guizot, 16h30-17h
Le 22 mars, Astrid Guillaume donnera une conférence en Sorbonne, Amphithéâtre Guizot, intitulée « Innovations en zoosémiotique » lors du colloque organisé par l’Association des Sciences du langage « Quoi de neuf chez les linguistes ?, Les sciences du langage, 40 ans après« . « La zoosémiotique a permis ces dernières années l’introduction des animaux vivants en sciences du langage de différentes manières, par l’étude des signes émis par les animaux sur leurs territoires, par la création de nouveaux termes permettant de qualifier les émotions et les comportements animaliers, par une approche théorique transdisciplinaire et par le biais d’une science ouverte et participative qui a permis de voir des comportements naturels impossibles à reproduire en laboratoire car relevant de la sentience animalière. Toutes ces innovations scientifiques ont permis d’ajuster le droit animalier pour une meilleure éthique animale. » Programme Il y a vingt ans, en 2005 paraissaient les actes du colloque de l’ASL intitulé « Mais que font les linguistes ? Les sciences du langage, vingt ans après ». L’intitulé de ce colloque, qui avait eu lieu en 2003, faisait allusion à l’année de fondation de l’ASL, 1983. Où en sommes-nous vingt ans plus tard, donc un peu plus de quarante ans après la fondation de l’Association des Sciences du Langage ? De prime abord, nous pouvons avoir le sentiment que, pour ce qui concerne la situation globale des sciences du langage, rien n’a bougé et que l’on pourrait aujourd’hui redire à peu près la même chose que ce qui figurait sur la quatrième de couverture des actes de 2005 : « Au moment où il apparaît que les sciences du langage se sont largement diversifiées, qu’elles entretiennent des contacts avec des sciences connexes, et qu’elles ne sont plus dominantes comme elles l’ont été, il importe de faire le point et d’imaginer l’avenir. Pour répondre à la question posée, ironique et inquiète, il est nécessaire de s’interroger sur la place des sciences du langage dans la société, avec en arrière-plan, le souci de les faire mieux connaître » ? Bien entendu, cette impression de stagnation n’est pas incompatible avec les découvertes et innovations dans tel ou tel cadre théorique restreint, ou sur telle ou telle question ponctuelle. Mais ces développements dans les sphères techniques ne modifient pas directement la place des sciences du langage dans la société. Certes, il semble possible de définir des zones d’inertie notamment pour ce qui concerne l’image de la discipline dans le monde académique ou auprès du grand public, la dispersion des recherches en sciences du langage, l’absence de consensus conceptuels ou terminologiques à grande échelle, le déficit de cumulativité ou encore l’identité des sciences du langage perturbée plus que jamais par la dissolution des frontières avec d’autres disciplines qui traitent de questions linguistiques : sociologie, sciences de l’éducation, informatique, sciences cognitives, sciences de l’information-communication. Cependant, en dépit de cette impression de stagnation, l’ASL a pris le parti de s’intéresser à ce qui peut être perçu comme nouveau dans la discipline : nouvelles théories, nouvelles méthodes, nouveaux outils, nouveaux modes d’intervention des linguistes. Parmi ces aspects nouveaux dans la discipline, et sans prétendre aucunement à l’exhaustivité, les thèmes suivants ont été retenus : – Les mots au tribunal : un corpus au croisement de la linguistique et du droit (Anna Arzoumanov) – Innovations en zoosémiotique (Astrid Guillaume) – La linguistique appliquée : questions d’aujourd’hui, questions de toujours ? (Martin Stegu) – Diffuser la recherche, informer les débats : contraintes et dilemmes liés aux formats médiatiques (Julie Neveux) – Vulgariser les Sciences du Langage sur internet (Romain Filstroff alias RF Monté) – Traductologie numérique et traduction augmentée : nouveaux horizons pour la formation (Nicolas Froeliger et Maria Zimina-Poirot) – Questions vives en Anthropologie linguistique (James Costa et Salomé Molina) Ces communications et les débats auxquels elles donneront lieu nous permettront d’engager des échanges sur les rapports que les sciences du langage entretiennent avec les sociétés contemporaines, et en particulier avec la société française. L’accès au colloque est libre et gratuit sous réserve des places disponibles et à condition d’avoir complété et envoyé le formulaire d’inscription avant le 12 mars 2025 (cliquer ici pour vous inscrire) Martin Stegu (WU Wien) « La linguistique appliquée : questions d’aujourd’hui, questions de toujours ? » Il ne fait aucun doute que de nombreux changements sociaux, économiques, politiques et surtout technologiques de ces dernières décennies représentent un défi particulier pour les approches linguistiques qui voudraient s’attaquer à des « problèmes du monde réel » – cf. la célèbre définition de la linguistique appliquée par Brumfit 1977 – et contribuer à les résoudre. D’autre part, un grand nombre de questions assez anciennes liées à la notion de linguistique appliquée – terme que je considère comme très proche, voire comme quasi-synonyme de « linguistique d’intervention » – n’ont pas encore à ce jour trouvé de réponses claires et définitives (et n’en trouveront peut-être jamais). Dans une première partie, nous aborderons donc une série de questions fondamentales qui ne sont donc pas tout à fait nouvelles, mais qui restent pertinentes : le statut disciplinaire de la linguistique appliquée, le caractère des solutions qu’elle peut offrir au grand public ‘folk’ (= principalement composé de non-linguistes) et les attentes de ce public vis-à-vis de telles solutions et « interventions ». Enfin, dans une deuxième partie, je traiterai de certains problèmes et champs d’application et méthodologies plus récents (ouverture vers le Sud global, multilinguisme, communication inclusive, linguistique queer, intelligence artificielle …), de leur potentiel et de leurs limites. Face au thème des « idéologies linguistiques », très en vogue aujourd’hui aussi, je voudrais conclure en évoquant le rôle de la ou des idéologies dans les sciences du langage et le rôle de la « conscience linguistique » (language awareness). Ce dernier terme, que j’interprète de manière très large, reste à mes yeux le concept le plus central pour la linguistique appliquée d’aujourd’hui et de demain. Nicolas Froeliger et Maria Zimina-Poirot (Université Paris Cité) « Traductologie numérique et traduction augmentée : nouveaux horizons pour la formation » La traductologie est, dans une très large mesure, une discipline liée à une pratique, avec une fertilisation croisée entre théorisation et vie professionnelle. La principale question qui se pose aujourd’hui aux traductologues qui se placent dans cette perspective est celle de la transformation des métiers de la traduction : celle-ci impose de se poser de nouvelles questions théoriques sur la nature même de la traduction, sur la pertinence du concept d’équivalence et sur la place de l’humain dans cet univers en rapide évolution. Co-responsables d’une formation en traduction (le master ILTS/Industrie de la langue et traduction spécialisée, à l’Université Paris Cité), les auteurs de cette contribution comptent explorer cette question dans le contexte de la formation en lettres et sciences humaines LSH, pour aboutir in fine à une réévaluation de la pratique traductive dans le monde numérique. James Costa et Salomé Molina (Sorbonne Nouvelle) « Questions vives en Anthropologie linguistique » Cette présentation propose une synthèse des perspectives émergentes en anthropologie linguistique, articulée autour de trois axes principaux. Nous débuterons par une exploration des enjeux contemporains liés aux minorités linguistiques, en questionnant la manière dont les pratiques langagières minoritaires façonnent diverses dynamiques sociales et politiques. Ensuite, nous examinerons les recherches émergentes en anthropologie de l’écoute, en mettant en lumière les approches qui interrogent non seulement le langage, mais aussi les modalités sensorielles et relationnelles de la communication. Enfin, nous aborderons la manière dont les affects, compris comme des forces sociales, ouvrent de nouveaux espaces de dialogue entre l’anthropologie linguistique et d’autres disciplines. Anna Arzoumanov (Sorbonne Université, STIH) « Les mots au tribunal : un corpus au croisement de la linguistique et du droit » Les mots et les discours ne sont pas la seule spécialité des linguistes. Il est une autre discipline qui les prend pour objet, le droit de la presse, qui est le droit qui protège la liberté d’expression tout en en évaluant les limites socialement acceptables. Comment décide-t-on de ce qui est condamnable ? À partir de quels critères les juges les évaluent-ils ? Quelles grandes questions linguistiques ce contentieux soulève-t-il ? Il s’agit dans cette présentation de réfléchir aux nouvelles perspectives qu’offre le regard croisé entre linguistique et droit pour appréhender la manière dont se fabrique ce jugement judiciaire des mots. À partir d’un travail de recherche inédit fondé sur un corpus de nombreuses décisions de justice en France, il s’agit d’éclairer le processus d’interprétation judiciaire des mots et de se demander quelle place y occupe la linguistique. Astrid Guillaume (Sorbonne Université, STIH) « Innovations en zoosémiotique » La zoosémiotique a permis ces dernières années l’introduction des animaux vivants en sciences du langage de différentes manières, par l’étude des signes émis par les animaux sur leurs territoires, par la création de nouveaux termes permettant de qualifier les émotions et les comportements animaliers, par une approche théorique transdisciplinaire et par le biais d’une science ouverte et participative qui a permis de voir des comportements naturels impossibles à reproduire en laboratoire car relevant de la sentience animalière. Toutes ces innovations scientifiques ont permis d’ajuster le droit animalier pour une meilleure éthique animale. Julie Neveux (Sorbonne Université, Celiso) « Diffuser la recherche, informer les débats : contraintes et dilemmes liés aux formats médiatiques» L’idée de cette communication est d’abord de témoigner d’une expérience de médiatisation en linguistique, en revenant sur les contraintes et les dilemmes que posent les divers formats médiatiques : si certains d’entre eux (interviews longues, sur arte.fr par exemple, podcast sur Arte radio ou France culture) permettent de développer des objets de recherche qui me sont propres (l’expressivité, les métaphores, lexicales et grammaticales), d’autres y sont moins propices, comme les interviews courtes et les « débats » (télévisuels ou radiophoniques), dont le format pousse souvent à la caricature; il s’agit alors de réviser les ambitions de «diffusion », l’exercice consistant, parfois minimalement, à « représenter » un métier, celui de linguiste, à faire entendre une voix collective et scientifique sur des questions souvent récupérées au gré d’objectifs et d’agendas politiques. Avec l’espoir, pour certaines polémiques, de permettre de convertir un sujet de passion en objet d’étude. Mes chroniques radiophoniques sur France Inter sont encore un autre format; j’y conçois mon rôle comme celui de « passeuse »; je tente de faire connaitre quelques travaux de la communauté linguistique, face à des contraintes multiples : temporelle —temps de parole (3 min 30 maximum) et temps de préparation (quelques jours pour m’informer sur les sujets des autres), l’horizon d’accessibilité, et l’équilibre nécessaire entre information et humour (facilitant l’accès à une discipline qui souvent effraie). La difficulté consiste, dans tous ces formats, à trouver le juste milieu entre ce que le grand public, spontanément, veut entendre, ses biais et préjugés, les notions qu’il pense déjà « maîtriser », qui lui sont familières, et le point de vue plus informé; la question étant : faut-il « partir » de l’expérience profane ou de la notion scientifique? Un des exemples donnés sera la notion « tics de langage », pour laquelle je proposerai un retour critique sur mon traitement du sujet. Monté (Romain Filstroff) Vulgariser les Sciences du Langage sur internet Si la linguistique reste une discipline mal comprise voire peu attrayante pour le grand public, elle a su trouver un public sur Internet. S’inscrivant dans la vague de la vulgarisation scientifique arrivée en sur YouTube, la chaine Linguisticae est née durant l’hiver 2015. Si elle n’était pas destinée à conquérir un large public, elle compte pourtant dix ans plus tard bientôt un demi-million d’abonnés et plus de 40 millions de vues. Son créateur, Monté, propose de retracer l’évolution de cette chaîne YouTube et de s’interroger sur ce qui peut susciter curiosité et engagement à partir de sujets parfois difficiles à comprendre pour les non spécialistes. Plus d’informations sur le site de l’ASL colloque-asl_2025_programme